Du koto au Ku-Chin 古琴 cela va de "soie"
Moins populaire que son équivalent à cordes de métal, le Ku-chin 古琴 (cithare ancienne) fait entendre le frottement discret des doigts sur les cordes de soie.
J'ai séjourné 6 mois à Taiwan en 1981, invité par l'Académie des Arts de Panchiao pour y étudier cet instrument, séjour interrompu par des problèmes de santé, séjour trop court pour en dominer durablement la technique venue du fond des temps, mais suffisant pour entrevoir toute la richesse de cet instrument mystérieux.
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1981 Panchiao - Taipei. Yon Ming, la fille de ma logeuse à l'Académie des Arts de Panchiao, joueuse de Ku-chin, pratique la nuit venue et n'aime pas trop qu'on vienne voir.
Je loge dans une cabane en terre battue au fond du jardin et quand j'entends le son du ku-chin je traverse le jardin, je m'approche de la fenêtre pour écouter à la dérobée.
Très mystérieux la pratique du ku-chin, avec un son très discret, secret...
A l'époque du Nouvel An chinois, quand ça pétarade de toutes parts, elle m'emmène visiter le professeur Chang, grand Maître de Ku-chin venu du continent avec Chiang Kai-chek. Il habite un appartement trés modeste, il porte la fatigue des ans mais surtout la blessure de l'exil définitif. Sur le balcon un oiseau prisonnier d'une cage d'où il ne sortira jamais. Dans la pénombre ses mains frottent la corde de soie strillée sur l'Océan immaculé, noir et mystérieux d'une laque parfaite.
Le frottement éveille délicatement les sens
Bruits ou notes ? Qu'importe. Dans la pénombre c'est Confucius il y a 2000 ans. Le son est intime, infime, mais il parle à tous les sens et diffuse l'apaisement. Il aime boire de l'alcool traditionnel dans un petit verre, le regard à des époques d'ici. Il range son instrument et nous partons; il a déjà oublié...